Rebelle

 Un(e) rebelle qui est-ce?

Selon la définition du Larousse (2019), l’adjectif rebelle signifie:

Qui est fortement opposé, hostile à quelque chose, qui refuse de s’y soumettre : Un enfant rebelle à la discipline.

Qui se prête difficilement à l’action à laquelle on le soumet : Mèche rebelle.

Qui est difficile à guérir, qui ne cède pas aux remèdes.

Selon cette définition, être rebelle, c’est donc s’opposer, ne pas se soumettre, ne pas céder.

Pour CRNTL (2012), le (la) rebelle est aussi celui ou celle:

Qui se révolte contre l’autorité du gouvernement légitime, d’un pouvoir établi.

Qui ne reconnaît pas l’autorité de quelqu’un, qui n’est pas docile.

Et moi, tout comme la mèche rebelle, je ne me suis pas laissée manier: la psychiatrie n’a pas réussi « sa mise en pli ».

Je me suis révoltée contre ces psychiatres qui faisaient et qui font aujourd’hui encore autorité dans le domaine de la santé de notre mental. La société leur a donné ce pouvoir, celui de décider quel état mental est normal et quel état ne l’est pas.

Mon état mental, mon système de pensées, ma réflexion, mon imaginaire ne leur plaisaient pas. Selon leurs critères, ma façon de penser le monde et la société n’était pas dans la norme, dans ce qui est attendu.

Quand j’étais entre leurs mains, j’ai tout de suite montré que je ne reconnaissais pas leur autorité, que je ne les sentais pas capables de m’aider dans la situation difficile que je vivais et que je ne leur laisserai pas la moindre chance de m’imposer leur façon de concevoir la vie et leur façon de considérer mon état mental. Cette perte de pouvoir a certainement été difficile à gérer pour eux. Les gens pas dociles possédant des visions différentes, ils n’aiment pas. Alors, ils leur font baisser leur garde en appliquant les mesures de répression légitimes que l’Etat leur a autorisé à appliquer: ralentissement des fonctions mentales à l’aide de substances chimiques, contraintes physiques à l’aide d’éléments divers et variés qui limitent la liberté de mouvement (camisole de force, cellule d’isolement,…) et pressions psychologiques, émotionnelles et sociales par des menaces et des discours qui incitent à la peur.

Qui se prêterait docilement à cela? Qui mettrait sa vie, sa santé mentale ou son futur dans les mains de telles personnes?

La réponse à ces questions n’est pas simple. En effet, le choix d’accepter docilement de se soumettre à ces traitements ou pas va dépendre de l’envie de la personne de s’intégrer à la société dans laquelle elle vit et de répondre à ses attentes.

Dans notre société, les valeurs sont telles, qu’on attend des gens qu’ils soient performants, compétitifs et productifs. Qu’ils sachent gérer leur stress et leurs émotions et ce, surtout en public, et qu’ils se montrent sous leur meilleur jour au quotidien.

De plus, on attend d’eux qu’ils se soumettent au paradigme matérialiste sans restriction.

Les personnes qui ne partagent pas ces valeurs, mais qui essaient tant bien que mal de rentrer et de coller à ces normes, finissent par en souffrir.

Enfant, j’ai essayé de toutes mes forces d’être la petite fille qu’on voulait que je sois. Adolescente, j’ai essayé de toutes mes forces de coller au modèle de la jeune fille parfaite qui étudie et qui se projette dans un futur où elle exercerait une profession scientifique qui aiderait les gens à être heureux…. Mais déjà depuis l’enfance, qu’est-ce qu’il avait été difficile pour moi de me plier à toutes ces exigences qui m’obligeaient à cacher mes réactions naturelles pour qu’on m’accepte… pour qu’on m’aime.

Ne pas montrer mes peurs, ne pas crier mes colères face aux injustices, ne pas montrer ma tristesse,… Etre d’humeur toujours égale, ne pas faire de vague… suivre le troupeau… ne pas être ce mouton noir qu’on évince parce qu’il ne ressemble pas aux autres…

Des efforts et une énergie monstrueuse dépensés à être comme une petite fille doit être….pour être aimée.

Adolescente, ces efforts et cette énergie à être la personne qu’on attend qu’une jeune fille soit, j’ai continué à les déployer, mais ce n’était plus seulement pour qu’on m’aime, mais aussi et encore plus fortement pour ne pas être rejetée du système ou ne pas y avoir ma place.

A l’adolescence, je pense que la question que nombre de jeunes se posent est: y a-t-il un place pour moi dans cette vie? Et c’est là que la réponse que l’adolescent(e) va apporter, va être cruciale pour sa vie future.

En répondant à cette question, je pense que l’erreur que font beaucoup d’ados, mais d’adultes aussi, est de confondre:

Avoir une place dans la vie et Avoir une place dans la société

Lorsqu’on pense que pour avoir une place dans la vie, il faut avoir une place dans la société, nous allons tout faire pour répondre aux exigences de la société, de sorte à nous assurer une place en son sein et par là une place dans la vie.

Alors que lorsque l’on comprends que pour avoir une place dans la vie, il n’y a pas besoin d’occuper une « place standardisée et conforme aux normes de la société », alors on change complétement de perspective et au lieu de tout faire pour se conformer à ce qui est « bien vu » dans notre société, nous faisons ou plutôt nous devenons qui nous sommes: nous prenons cette place dans la vie qui nous permettra d’avoir notre place dans la société.

Adolescente, j’ai cru que pour avoir le droit de vivre, il fallait avoir une place dans la société et que pour avoir une place dans la société, il fallait faire comme on me disait: comme mes parents me disaient, comme les enseignements me disaient, comme les autorités me disaient….

J’avais tellement peur d’être rejetée et de ne pas avoir de place dans ce monde, que j’étais prête à tout pour qu’on m’accepte dans ce « cercle d’élus » qui vivent une vie heureuse dans le système social.

Mais le stress engendré par les années passées à réprimer ma vraie nature, à me conformer aux règles et à suivre le chemin sans joie que la société avait tracé pour les jeunes filles m’a rattrapé et épuisé.

Au gymnase (lycée), je n’arrivais plus à donner le change. Je n’arrivais plus à être celle qu’on attendait que je sois….

Pour réussir un parcours scolaire « sans faute » (la faute étant définie ici comme l’échec scolaire ou la non obtention du diplôme: chose qui est très très mal considéré dans la société), j’avais petit à petit mis de côté les derniers éléments de soupape qui me permettaient de gérer l’énorme stress engendré par la pression à la conformité. Enlever mes derniers moyens de m’évader et d’être moi-même, a été l’élément de conformisme de trop. Les vannes ont commencé à sauter! C’est comme si les coutures de l’habit de conformité que j’avais enfilé depuis mon enfance étaient en train de sauter!!!

Mon « habit de conformité » allait exploser et tout le monde allait voir que je n’étais pas comme eux, que j’étais un imposteur qui tentait tant bien que mal de cacher son anormalité et son incapacité à faire comme tout le monde sous un habit de normalité trafiqué de toutes pièces.

L’énergie et les efforts déployés pour cacher ma vraie nature et pour maintenir les apparences étaient tels que le soir, en rentrant chez moi, je m’effondrais littéralement….

Je commençais à fortement angoisser à l’idée que les gens réalisent que je n’étais qu’un imposteur incapable de faire comme tout le monde. Je déprimais à l’idée de ne pas savoir comment j’allais faire pour vivre toute ma vie avec cette pression trop forte: comment allais-je trouver, tous les jours, pendant encore au moins 60 ans, l’énergie pour donner le change et me conformer à ce que la société attend d’un individu qui aspire à vivre heureux en son sein?

A la fin de l’adolescence, j’étais épuisée par cette quête sans relâche de ma place dans la société. J’angoissais et je déprimais à l’idée de ne pas avoir ce que je considérais comme le précieux sésame pour mériter d’être en vie: pour moi si je n’arrivais pas à trouver et obtenir une place dans la société, je n’avais pas ma place dans cette vie, dans ce monde…

La pensée du suicide à l’adolescence…. je pense qu’elle vient souvent de là: de cette idée que si on n’arrive pas à se conformer ou à justifier notre utilité pour la société, alors on n’a pas sa place dans la vie.

Cette idée, je le sais maintenant, est complétement fausse: ce n’est pas parce qu’on n’est pas à la place à laquelle la société voudrait qu’on soit, qu’on n’a pas le droit de vivre. La société, c’est juste un ensemble de règles qui dictent comment un groupe d’humains a décidé de fonctionner ensemble. Si on a envie de fonctionner autrement, on a le « droit » et je dirais, on en a même le « devoir ».

Ce n’est pas parce qu’on ne souhaite pas fonctionner selon des règles et des valeurs qui ne nous correspondent pas qu’on n’a pas le droit de vivre!

Tout le monde a le droit de vivre sa vie comme il l’entend tant qu’il respect la vie de l’autre.

Bien évidemment, au moment où mon « habit de conformité » a commencé à craquer les coutures, mon entourage s’est inquiété. Mais la solution pour faire « rentrer les choses dans l’ordre » s’est rapidement manifestée: les redresseurs de non-conformité étaient là: les psychiatres se sont présentés à ma porte.

Tu n’arrives pas à faire comme tout le monde? Tu fais des vagues? On va t’aider à reprendre le droit chemin….ou on va te « planquer à la cave » avec les autres rebus de la sociétés, avec tous ceux, qui comme toi, n’arrivent pas à fonctionner comme on attend qu’ils le fassent.

Je conçois la psychiatrie comme « la section de la société » qui s’est donné et, au final, qui a légitimement reçu comme mission de faire rentrer dans le droit chemin, les individus qui ne se conforment pas aux codes sociaux.

Comme je n’arrivais vraiment plus à me conformer aux codes sans m’effondrer et faire craquer les coutures de mon habit de conformité, mon entourage a décidé qu’il fallait faire appel aux psychiatres pour qu’ils m’aident à comprendre comment être, penser et faire pour vivre une vie normale et heureuse.

Je ne voulais pas aller en psychiatrie, car je me suis dit qu’il allait me falloir fournir encore plus d’énergie et d’efforts pour « montrer ma normalité » pour qu’on « m’estampille: conforme pour vivre dans cette société: a sa place!« 

J’étais épuisée par les efforts que je fournissais pour suivre la voie scolaire qu’il convenait en vu d’obtenir le sésame qui estampille: « conforme aux exigences scolaires: a obtenu son diplôme!« . Je ne voulais pas devoir encore ajouter la contrainte de devoir prouver que j’avais un fonctionnement mental conforme.

J’ai donc tout fait pour ne pas aller en psychiatrie. Pendant plusieurs heures, je me suis opposée à leur décision de me faire suivre un traitement. Puis, à la fin, j’ai changé d’avis en me disant que si je ne me conformais pas à leur demande, ça allait mal finir, puisqu’ils faisaient autorité dans le domaine de ce qui est conforme ou ne l’est pas. Je me suis dit que si je voulais qu’on me considère comme quelqu’un qui fonctionne normalement, il fallait que je suive les règles de vie de la société et que j’aille faire un tour dans ce « service » pour que je prouve que j’avais les aptitudes pour me conformer à ce qui est attendu.

Mais comme les psychiatres m’avaient vue très réfractaire à leur proposition de traitement et que par ailleurs, ils s’étaient déjà fait une opinion sur mon état mental à la lecture des observations de psychologues qui m’avaient suivie pendant mon enfance, je pense que j’avais déjà sur le front, aveuglante comme la lumière d’un gyrophare, la très belle étiquette:

NON CONFORME! 

© Carole Advices 12 avril 2019

Passage à vide

Ce matin, petit passage à vide.

Depuis quelques semaines, je passe par des moments de découragement et de grosse fatigue. Je sais que je suis dans une phase de transition qui apportera de gros changements.

Cela fait près de 20 ans que je suis à l’AI (Assurance Invalidité) et dans quelques semaines, je vais sortir de ce système. Cela fait plusieurs années que je suis dans la démarche de sortir de ce système et maintenant que cela devient concret, je réalise que c’est un gros saut qui se prépare.

Enfin, je ne serai plus vue comme celle qui a une maladie mentale qui la rend incapable de s’insérer dans la société. Enfin, « le système » reconnaît que je ne suis pas anormale, que je dispose de toutes les capacités mentales pour vivre une « vie normale ».

Cependant, il est clair que ce soutien financier, cette rente d’invalidité, j’en ai eu besoin pour vivre lorsque les médicaments psychiatriques faisaient partie de ma vie. Ces produits et les mauvais traitements psychiatriques que m’ont administrés les médecins m’avaient rendue bien incapable de fonctionner au quotidien et de subvenir à mes besoins les plus basiques. La décérébration que j’ai subie pendant ces années de mauvais traitements psychiatriques m’avait rendue incapable de penser, avait changé ma personnalité et m’avait énormément affaiblie physiquement. Travailler dans cet état, c’était impossible. Je remercie donc l’état et l’assurance invalidité d’avoir subvenu à mes besoins pendant cette période noire de ma vie. Je remercie également chaleureusement mon conseiller AI d’avoir pris le temps de comprendre qui « se cachait » derrière ces effrayants diagnostiques psychiatriques et d’avoir su être à l’écoute au moment où j’ai repris ma liberté face à la psychiatrie: dans ce moment où je me reconstruisais et je créais mon avenir. 

Cher monsieur M., même si les médecins de l’AI ont court-circuité votre évaluation des conditions qui me permettraient de sortir de l’AI en douceur, vous avez su être là et à l’écoute de mes besoins en matière de reconstruction professionnelle. Même si cette sortie de l’AI arrive très brutalement par rapport à ce que vous et moi avions imaginée, elle arrive à un moment de ma vie où je suis capable d’encaisser les changements brutaux.

Depuis plusieurs années maintenant, je me prépare à reprendre une activité professionnelle. Ou plutôt devrais-je dire, à commencer une activité professionnelle, puisque ayant été plongée dans le monde psychiatriques et mise à l’assurance invalidité à l’adolescence, je n’ai jamais vraiment été en mesure de travailler. Bien sûr, j’ai fait quelques tentatives désespérées pour travailler, mais avec la chape de plomb médicamenteuses qui me décérébrait et affaiblissait mon corps, j’ai bien été incapable de garder un travail plus que quelques semaines.

Au jour d’aujourd’hui, 10 ans après avoir arrêté les médicaments psychiatriques (neuroleptiques, benzodiazépines et antidépresseurs), et après avoir passer plusieurs années à me battre contre les dégâts occasionnés par ces produits et avoir récupérer seule, et avec beaucoup d’efforts quotidiens, je suis physiquement, psychologiquement, cognitivement et émotionnellement prête à reprendre ma vie professionnelle là où la psychiatrie me l’avais brisée il y a maintenant plus de 23 ans.

Mais ce passage dans l’enfer de la psychiatrie et surtout ma reconstruction après m’en être extirpée m’ont permis d’acquérir des ressources insoupçonnables qui me rendent maintenant capable de faire face aux plus gros défis de la vie. Ce passage entre les mains de la puissante psychiatrie et de ses alliées très influentes et omniprésentes, les firmes pharmaceutiques, m’a également donné une direction vers laquelle orienter ma carrière professionnelle. Pour sortir de la psychiatrie et des médicaments psychiatriques, j’ai passé des années à me documenter sur leurs fonctionnements, ce qui m’a permis d’acquérir une connaissance hors norme de ce milieu et des produits qu’il utilise. Cette connaissance, j’ai, depuis ma sortie de la médication psychiatrique, décidé de la partager et de la mettre à disposition des utilisateurs de ces produits, des personnes qui sont confrontés de près ou de loin à la psychiatrie et finalement, à la terre entière.

Toutefois, je ne vais pas limiter mon activité professionnelle à la diffusion de l’information concernant le fonctionnement de la psychiatrie et des médicaments psychiatriques que sont les somnifères, les anxiolytiques, les antidépresseurs, les antipsychotiques, les stimulants ou encore les régulateurs de l’humeur. Non, je ne vais pas me limiter à ça, puisque cela ne constitue qu’une infime partie de la sortie de l’ère psychiatrique et pharmaceutique. En effet, une fois que j’ai arrêté les médicaments et les visites en psychiatrie, il m’a fallu reconstruire entièrement ma vie.

J’a dû reconstruire ma vie personnelle, ma vie familiale, ma vie sociale et maintenant ma vie professionnelle, car avec à cause des mauvaises traitements physiques, psychologiques et chimiques infligés par les psychiatres, j’avais tout perdu.

J’ai recommencé par me reconstruire physiquement, puis cognitivement et émotionnellement. Cela m’a pris plusieurs années pour retrouver mes capacités physiques, ma santé, ma vitalité, mes aptitudes à la réflexion, ma capacité de jugement et mes capacités mnésiques. A noter qu’aujourd’hui, même avec tous les efforts quotidiens réalisés pour récupérer mes fonctions mémorielles (se rappeler des souvenirs de cette époque ou utiliser ma mémoire de travail), je n’ai pas été en mesure de les récupérer à 100%. Même si je dispose aujourd’hui d’une très bonne mémoire, elle n’est pas celle que j’avais avant les médicaments psychiatriques.

Ma reconstruction émotionnelle est passée par l’acquisition et la mise en pratique d’outils utilisés en Thérapie Cognitive et Comportementale. Ces outils ne m’ont jamais été proposés pendant les années passées en psychiatrie. Ces outils, je les ai découverts au cours de mes recherches pour réapprendre à fonctionner. J’ai appris à les mettre en pratique seule, car les psychothérapeutes ou les psychologues que je consultais à l’époque se figeaient sur mon passé psychiatrique et sur les symptômes de sevrage terrifiants qui se maintenant encore des années après l’arrêt complet des médicaments psychiatriques. Ces symptômes étaient notamment une anxiété généralisée accompagnée d’une agoraphobie avec attaques de panique qui me maintenait cloîtrée chez moi: le moindre pas en dehors de ma maison me déclenchaient de terribles attaques de panique. Avec le recul, je réalise que j’étais dans un état de stress post-traumatique après les atrocités que j’avais vécu en psychiatrie.

Ainsi, les séquelles qu’avaient laissé les années d’enfer passées sous le joug de la psychiatrie, m’empêchaient également de trouver du soutien auprès de thérapeutes, trop impressionnés ou déroutés qu’ils étaient par les terribles séquelles que je manifestais à l’arrêt des médicaments psychiatriques et à la sortie du monde de la psychiatrie.

C’est donc seule, que j’ai recherché et mis en pratique ces outils pour gérer mes angoisses et reprendre le contrôle de mon état de stress post-traumatique. ça a été et c’est toujours un travail de grande haleine. Quotidiennement, je prends le temps de travailler ces outils, de les perfectionner et de les faire évoluer avec mes besoins du moment.

Tout ce parcours pour me reconstruire émotionnellement, psychiquement et physiquement, toute cette « physiothérapie psychique et émotionnelle » et cette réhabilitation physique, comportementale, cognitive et sociale qu’aucun thérapeute n’a été en mesure de me fournir à cause, certainement, de l’état préoccupant dans lequel m’ont laissé ces années de psychiatrie… toute cette « thérapie », toute cette reconstruction de soi, tout ce retour à la vie, je souhaite maintenant l’offrir à tous ceux qui sortent, meurtris, de la psychiatrie.

© Carole Advices 9 avril 2019

Pour aller plus loin:

Vidéos « Se reconstruire après l’arrêt de la médication psychiatrique »

État maniaque, levée de l’inhibition et perte du contrôle des impulsions

L’état maniaque, la levée de l’inhibition et la perte du contrôle des impulsions sont les principaux dangers liés au sevrage des antidépresseurs.

Les antidépresseurs étant capables, en sur-stimulant le système nerveux, de déclencher un état maniaque, une forte angoisse interne ou une akathisie, et de provoquer une perte de contrôle des impulsions et une désinhibition comportementale, nous vous conseillons fortement de surveiller l’apparition de ces symptômes qui peuvent être les signes précurseurs d’un passage à l’acte (tentative de suicide, suicide, violence, agressivité, comportements autodestructeurs (auto-mutilations)…).

Étant donné que le risque de suicide, d’agressivité et d’actes violents augmente lors de tout changement de dosage, il est impératif que vous réalisiez votre sevrage sous la surveillance accrue et constante de votre médecin et de votre entourage. Par ailleurs, comme nous l’avons vu, les antidépresseurs peuvent induire une anosognosie médicamenteuse vous rendant incapable de réaliser ce qui vous arrive et de prendre conscience des effets que le changement de dosage produit sur vous. Par conséquent, restez vigilant et demandez à votre famille, à vos amis et à votre médecin de surveiller l’apparition de signes qui indiqueraient que vous êtes en train de devenir euphorique, impulsif, « high » ou qu’il est en train de se produire des choses inhabituelles, farfelues, irréalistes dans votre vie.

Les signes de l’apparition d’une sur-activation du système nerveux

À l’apparition de ces signes ou symptômes, soyez hypervigilant et assurez-vous de la présence d’une personne de confiance 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Parlez-en immédiatement à votre médecin.

Quels sont les symptômes et les signes à surveiller ?

Surveillez notamment l’apparition des symptômes et de signes de l’état maniaque (Wikipédia, 2017) :

  • une excitation, une exaltation, un ressenti de « pressions intérieures » ;
  • une humeur « élevée » : euphorique classiquement, mais aussi une irritabilité, une plus grande réactivité (« au quart de tour »), une propension à se mettre en colère ;
  • des rires pour des choses futiles ou sans aucune raison.
  • de l’activité sans repos, de l’agitation improductive. La personne commence plusieurs choses et ne les termine pas, par exemple ;
  • une diminution de la pudeur, une « perte de gêne » allant parfois jusqu’à des attitudes de séduction et des contacts sexuels à l’excès ou au hasard (alors que dans son état « normal », la personne n’aurait pas souhaité avoir ce genre de comportement) ;
  • une accélération de la pensée : incessamment de nouvelles pensées traversent la tête de la personne :
  • difficultés de concentration : difficultés à se tenir à une même activité, distractibilité,
  • troubles du cours de la pensée : en parlant de quelque chose, la personne s’écarte encore et encore du fil de sa pensée (digressions multiples) et elle a du mal à retrouver le sujet initial dont elle voulait parler,
  • la fuite d’idées : les pensées se suivent extrêmement rapidement (tachypsychie), se bousculent parfois dans la tête. La personne passe du centième au millième. Les associations d’idées se relâchent. La suite des pensées reste logique pour la personne, mais pour son interlocuteur, il est parfois difficile de suivre le fil du discours (« coq à l’âne »). La personne qui souffre de manie, ayant oublié le but de son récit, n’est plus forcément capable de répondre à des questions ultérieures;
  • un besoin important de parler (logorrhée), et une parole abondante, accélérée, inarrêtable. Il s’agit du reflet de l’accélération des pensées. Dans les cas extrêmes, les paroles se précipitent si rapidement que l’auditeur a des difficultés à suivre ;
  • une assurance excessive ;
  • une réduction du besoin de dormir, sans que la personne ne se sente aussi fatiguée qu’elle le devrait en dormant si peu. La réduction du sommeil est souvent un des premiers signes d’un épisode maniaque ;
  • sentiment altruiste : envie d’aider les autres, ressenti des émotions des autres (hyper-empathie) ;
  • hypersensibilité affective (émotions plus vives) et quelquefois sensorielle ;
  • labilité émotionnelle : le fait de passer facilement du rire aux larmes ;
  • parfois la négligence de l’alimentation ou de l’hygiène

Si, avant le sevrage, vous souffrez de ces effets secondaires graves (syndrome sérotoninergique, manie, akathisie,…) causés par les antidépresseurs, alors il est impératif que vous vous adressiez à un médecin compétent pour qu’il mette en place un sevrage adapté à la situation : un sevrage plus rapide et sous surveillance accrue sera souvent mis en place en vue de réduire l’intensité de ces effets secondaires graves de l’antidépresseur.

Si vous ne présentez pas ce type de réactions, un sevrage lent et médicalement encadré est le meilleur moyen d’éviter qu’elles surviennent.

Les symptômes de sevrage des antidépresseurs

Les symptômes de sevrage (Breggin 2013)

  • Des réactions émotionnelles allant de l’anxiété à la dépression et la manie
  • Des réactions physiques comme des acouphènes, des vertiges, un sentiment de perte d’équilibre et/ou diverses horribles sensations physiques souvent comparées à des chocs ou des décharges électriques dans la tête, le corps ou sur la peau.
  • Des changements d’humeurs :
  • Anxiété et attaque de panique
  • Dépression
  • Manie
  • Des envies suicidaires
  • Irritabilité et colère excessive
  • Insomnie
  • Rêves vifs et paraissant réels
  • Des sensations neurologiques anormales :
  • Vertiges, sensation de tourner ou sentiment d’instabilité
  • Sensations anormales sur la peau
  • Hypersensibilité au bruit et impression d’entendre des sons anormaux
  • Sensations comme des chocs électriques (particulièrement dans la tête)
  • Des mouvements anormaux :
  • Tremblements
  • Spasmes musculaires
  • Pertes d’équilibre et démarche similaire à celle d’une personne ivre
  • Des problèmes gastro-intestinaux :
  • Anorexie
  • Nausées
  • Vomissements
  • Diarrhée
  • Une faiblesse générale du corps
  • Fatigue et lassitude extrêmes
  • Douleurs musculaires
  • Frissons
  • Transpiration
  • Autres :
  • Problèmes visuels
  • Problèmes capillaires
  • Rougissement persistant

Comme le souligne Breggin (2013), ces symptômes ont une origine physique et non psychologique. Garder à l’esprit que si vous développez des sentiments dépressifs, anxieux, maniaque ou d’irritabilité dans les jours ou les semaines qui suivent le début du sevrage, il est nettement plus probable que ce soit une réaction de sevrage plutôt que le retour des problèmes émotionnels d’origine (Breggin, 2013).

Les gélules à micro-billes : la technique du micro-sevrage

Comme l’explique Altostrata (2011), certaines personnes trouvent qu’elles supportent mieux des réductions de dose d’une bille à la fois plutôt que des réductions de 5% ou 10%. Les réductions de 5% à 10% se font, dans la majorité des cas, tous les 15 à 30 jours, mais lorsqu’on réduit d’une bille la dose en cours, les diminutions peuvent se faire plus fréquemment.

Un des problèmes rencontrés avec cette méthode de micro-sevrage est que comme il n’y a généralement pas le même nombre de billes dans les gélules, le sevrage n’est pas si doux et constant qu’il le devrait. En plus, si la bille qui est enlevée est celle qui contient de l’excipient, alors la diminution n’aura pas lieu. En conclusion, avec cette méthode, le dosage journalier risque d’être très fluctuant et surtout différent de celui théoriquement espéré.

Comment pallier aux problèmes liés aux gélules à micro-billes ?

La préparation magistrale

La première solution, la plus simple et la plus sûre, est de demander à votre pharmacien de préparer les gélules avec les doses voulues. Pour cela, il faudra avoir recours à ce qu’on appelle la préparation magistrale. Le pharmacien pourra réaliser cette préparation magistrale du médicament si elle a été ordonnée par un médecin.

Les astuces des utilisateurs

Voici quelques astuces qui ont été trouvées par les utilisateurs de gélule et de capsule pour réaliser des diminutions de dose.

Les techniques pour compter les billes contenues à l’intérieur d’une capsule/gélule

Ouvrir la capsule, déverser les billes sur un papier de couleur foncée pour augmenter le contraste entre le fond et les billes en vue de faciliter le comptage. À l’aide d’une lame de couteau ou d’une carte de crédit, compter les billes par paquets de dix.

Voici une vidéo qui montre comment un utilisateur compte les billes contenue dans une gélule d’Effexor XR : https://youtu.be/4qePLPMdp4E

Certains réalisent un comptage plus grossier : ils alignent les billes contre une règle et enlève le pourcentage de diminution en s’appuyant sur la graduation de la règle. Cette technique peut se révéler moins précise et par conséquent moins adaptée aux personnes qui sont très sensibles aux diminutions de doses et qui pourraient ressentir les effets d’une erreur de réduction. Par ailleurs, lorsque la gélule contient de billes de tailles différentes, cette technique de comptage à l’aide d’une règle métrique devient encore plus imprécise et il est fortement déconseillé de l’utiliser pour compter des billes de tailles différentes.

La méthode de Sly pour compter les billes de même taille

Une des techniques pour compter des billes de même taille avec une règle est celle de Sly un membre du forum Surviving Antidepressants. Sly (2013) imprime des règles millimétrées sur une feuille de papier foncé. (Il est aussi possible d’utiliser du papier millimétré collé sur du papier cartonné). Ensuite, il plie le papier sur la longueur de sorte de créer un V entre deux règles pour y déposer les billes. Puis, il compte le nombre de billes qui sont contenues dans un centimètre. Dans son cas, il a constaté qu’il y avait chaque fois 11 billes par centimètre et que par conséquent il n’avait qu’à aligner les billes le long de la règle et procéder à ses diminutions en s’appuyant sur les centimètres.

Il prenait des capsules de 30 mg de Cymbalta. Il a calculé le nombre de billes total contenu dans sa capsule de 30 mg de Cymbalta et est arrivé aux résultats suivants :

30 mg = 290 billes

5 mg = 4.4 cm

Par exemple, pour enlever 10 mg de la capsule, il a retiré une ligne de billes d’une longueur de 8.8 cm

Il a ensuite utilisé son papier plié et formant une rigole pour verser le nombre de billes voulu dans des capsules neuves.

Retrouvez la méthode de Sly en image sur le forum Surviving Antidepressants à l’adresse suivante :
https://www.survivingantidepressants.org/topic/5088-slys-method-for-measuring-beads-of-the-same-size-instead-of-counting-them/

Diminuer uniformément le nombre de billes de chaque taille

Lorsqu’il y a des billes de plusieurs tailles dans la capsule, les utilisateurs ont trouvé judicieux de classer les billes en fonction de leur taille et de réaliser la diminution en réduisant le nombre de billes dans chaque groupe de taille. En effet, réaliser la diminution en enlevant que des billes de grande taille ou que des billes de petite taille pourra se révéler problématique sur le long terme : par exemple, si les grosses billes contiennent une plus grande quantité de substance active, alors retirer uniquement des billes de ce groupe engendrera une diminution de dose plus importante que prévue et à long terme, il de grands risques de se retrouver en sous-dosage.

Compter les billes de plusieurs gélules et faire une moyenne du nombre total de billes contenues dans une gélule

Si vous n’êtes pas trop sensible aux diminutions de dose, il est possible de faire une moyenne du nombre total de billes contenues dans les gélules et de réduire le nombre de billes du pourcentage voulu à partir de ce nombre total moyen. Cela permet d’éviter de devoir recompter la totalité des billes des gélules chaque jour.

Attention, le nombre total de billes contenues dans une gélule variant énormément d’un fabricant à l’autre, il est conseillé d’établir un nombre total moyen pour un fabricant et surtout de fréquemment re-contrôler que le nombre total ne varie pas trop (notamment lors du passage à une nouvelle boîte de gélules).

Peser les billes et réaliser les diminutions à partir du poids du contenu de la gélule

Une autre technique utilisée pour éviter de devoir compter les billes (ce qui peut devenir fastidieux) est d’ouvrir la gélule, de peser son contenu à l’aide d’une balance de précision et de retirer le pourcentage voulu, puis de remettre les billes restantes dans la gélule.

Cette technique est indiquée par Altostrata (2011) en cas de forte sensibilité aux variations de dosage.

Finalement, les utilisateurs ont trouvé qu’il pouvait être utile de conserver les billes en trop et de se procurer des gélules/capsules vides pour réaliser les diminutions.

Comment réaliser des diminutions avec des gélules contenant des micro-billes ?

Une des manières de faire des utilisateurs est d’ouvrir la capsule, de compter les billes et de réduire le nombre total de billes contenues dans la capsule du pourcentage qu’on souhaite enlever, puis de remettre le nombre de billes correspondant à la dose journalière voulue dans la capsule avant de la prendre. Par exemple, si la capsule journalière que vous prenez contient 130 billes et que vous voulez réduire la dose de 10%, alors vous retirerez 13 billes et remettrez les 117 billes restantes dans la capsule avant de l’avaler.

Mais avec les « diminutions réalisées sur de billes », les utilisateurs se heurtent à plusieurs problèmes :

  1. il n’y a pas toujours le même nombre de billes dans les capsules
  2. les billes n’ont pas toutes la même taille, on dénombre souvent plus de 4 tailles de billes différentes
  3. il y a des billes qui contiennent la substance active et il y a des billes qui contiennent des excipients

Le sevrage des antidépresseurs: les ressources utiles

Antidépresseurs ISRS: tableaux des demi-vies et des doses équivalentes

Durée de la demi-vie d’élimination et des doses équivalentes des antidépresseurs ISRS:

Les 8 ISRS sur le marché d’après David Healy (2011)
Molécule active Noms commerciaux F / CH Durée de la Demi-vie

(ADMED Laboratoires, 2016)

Action sur

(Boisvert, 2008)

Doses équivalentes approxi-matives
fluoxétine Prozac / Fluctine 4 à 6 jours
(4-16 jours pour le métabolite actif (norfluoxétine))
sérotonine
(5-HT)
20 mg
paroxétine Deroxat / Divarius / Paronex 12 à 44 heures sérotonine
(5-HT)
20 mg
sertraline Zoloft / Sertragen 26 heures sérotonine
(5-HT)
50 – 75 mg
citalopram Seropram / Claropram 33 heures sérotonine
(5-HT)
20 mg
escitalopram Seroplex 30 heures (Compendium, 2017) sérotonine
(5-HT)
5 – 10 mg
fluvoxamine Floxyfral 20 heures sérotonine
(5-HT)
100 mg ?
venlafaxine Effexor / Efexor / Venlax 5 heures
(11 heures pour le métabolite actif (O-desméthyl venlafaxine)
sérotonine
(5-HT), noradrénaline (NA) à partir de 150mg (Healy, 2011) et dopamine (DA) à partir de 225mg
75 mg
duloxétine Cymbalta 9 à 19 heures sérotonine
(5-HT) et noradrénaline (NA)
30 mg

Sevrages spécifiques