Les 3 pages du matin: le kit de survie

Tenir un journal intime est une des choses qui m’a permis de rester en vie dans ces périodes difficiles que sont le sevrage et le post-sevrage. Coucher sur le papier tout ce qui me faisait mal et que je ne pouvais pas dire à mon entourage (et encore moins à un psy.)
Déverser des kilomètres d’encre et noircir des dizaines de cahiers a été salvateur pour moi.

En lisant le livre de Julia Cameron, Libérez votre créativité Osez dire oui à la vie !, j’ai réalisé à quel point le fait de prendre le temps, chaque jour, de poser sur le papier ce qui encombre notre esprit, ce qui nous fait mal, ce qui nous freine ou ce que nous n’osons pas dire à notre entourage, est un des outils le plus puissant pour évacuer au quotidien ce qui nous blesse et pour garder le cap vers ce qui nous tient à coeur, vers ce qui est essentiel à notre vie.

Lorsque j’étais en sevrage (des anxiolytiques et des antidépresseurs), mais déjà lors des quelques années qui on précédé mes derniers sevrages, j’étais bien incapable de prendre la plume et d’écrire: même si c’était pour vomir sur le papier toute cette tension et cette haine que je vivais, prisonnière du monde psychiatrique et de ses produits.

En 2008, après 15 années passées sous médicaments psychiatriques, j’ai enfin commencé à retrouver ma capacité à écrire. Mes facultés cognitives avaient tellement été réduites pendant ces 15 années de mauvais traitements psychiatriques que j’avais été rendue incapable d’en tirer quelque chose ou de produire un simple raisonnement. Enfin délivrée de ces substances psychotropes et du joug de la psychiatrie, j’étais enfin en mesure de m’épancher par écrit sur ce qui m’arrivait: sur ce que je vivais dans mon plus profond for intérieur.

J’ai commencé par écrire des poèmes. Je crachais ma haine de ce que je vivais chaque jour, rejetée que j’étais depuis des années à cause de la personne infâme et noire que j’étais devenue depuis que je prenais des médicaments psychiatriques et que j’avais été petit à petit détruite et réduite à néant par les tortures psychologiques et physiques subies en milieu psychiatrique. Pendant deux ans, j’ai expurgé ma haine, ma souffrance et ma colère sur la papier au-travers de court poèmes.

Puis, une fois la haine expurgée, je me suis mise à réfléchir plus lucidement. Avoir cracher mes entrailles de souffrance, ma haine du système et ma colère m’avait en quelque sorte libérée de ces émotions destructrices. Au lieu de garder cette haine, cette souffrance et cette colère en moi, et ainsi les laisser me bouffer de l’intérieur, je les avais, en partie, expulsée en les couchant quotidiennement sur le papier. 
Sous la colère, en proie à une souffrance indicible, j’étais devenue bien incapable d’analyser et de comprendre clairement où j’en étais. Une fois ces émotions destructrices apaisées (mais pas encore oubliées), je pouvais maintenant me mettre à écrire sous un autre registre: l’analyse plus lucide de mon parcours. 

En 2010, deux ans après l’arrêt complet des médicaments et mauvais traitements psychiatriques, je me mis à écrire mon parcours dans un blog. Chaque jour, je prenais le temps de me remémorer une partie de mon passage en psychiatrie, en commençant par l’année 1994, année au cours de laquelle j’ai été plongée dans ce domaine de la médecine qu’est la psychiatrie.

La haine, la colère et la souffrance quelque peu apaisées par ces deux années que je leur avais consacrées, je pouvais relater mon parcours d’une manière plus « juste », plus claire. Ma vision de ce que s’était passé n’était plus totalement embrouillée par des larmes de haine et de colère.

Une fois mon parcours couché sur le papier, comme pour cette haine qui me consumait avant, je pouvais le laisser derrière moi. Poser à l’extérieur de soi ce qui nous ronge à l’intérieur permet de gagner une de ces libertés et une de ces clartés intérieures, qui permet d’avancer et de ne plus rester bloquer dans l’émotion ou l’histoire passée. C’est comme si expurger ma haine et mon parcours en psychiatrie sur le papier, avait permis de libérer un espace en moi. Un espace qui me permettrait d’accueillir autre chose, quelque chose de nouveau, quelque chose que j’aurais choisi et qui me ferait du bien.

Ma haine, ma souffrance, ma colère, ma tristesse, mais aussi mon passé, l’histoire que j’avais vécu prenaient tellement de place dans mon être avant que je ne l’ai en chasse qu’ils ne laissaient plus aucune place pour le renouveau. Une fois extériorisés sur le papier, ils n’avaient plus autant d’impact sur moi et je pouvais avancer et ouvrir mon coeur à quelque chose de nouveau.

Mais la peur, cette émotion était toujours là! J’avais peur: j’étais terrorisée au point d’être tétanisée et de ne plus rien oser. J’avais envie de me replier sur moi-même et de ne plus rien tenter, de peur de remplir cette place libérée de la haine et de la rancoeur, par d’autres expériences aussi destructrices et ravageuses que celles que j’avais vécues les dernières 17 années passées! Comment oser à nouveau tenter de nouvelles expériences sans avoir au fond de soi la peur intense qu’un tel enfer ne se reproduise et ne m’enferme encore 15 ans dans la souffrance, la douleur et la terreur? Comment oser se laisser à nouveau touchée par quelque chose d’extérieur? Comment oser à nouveau faire confiance et oser se laisser pénétrer par de nouvelles expériences?

En 2010, tellement terrorisée par ce que la société et le monde extérieur m’avaient fait endurer, je n’osais plus me départir de ma peur, cette alliée qui me permettaient de survivre et de repérer le moindre indice qu’une situation allait dégénérer et tourner à mon désavantage.

Alors, je me suis mise à chercher comment comprendre ma peur et comme la gérer de sorte qu’elle soit toujours là pour m’alerter d’un danger pouvant « envahir mon monde intérieur », mais que d’un autre côté, elle ne m’empêche pas de vivre à nouveau de belles choses: qu’elle ne m’empêche pas de me remplir de bonheur!

Je me suis alors documentée sur la peur et j’ai beaucoup écrit sur la peur. Je reproduisais ce schéma qui m’avait permis de sortir de la haine et de la colère: j’extériorisais ma peur sur le papier, pour qu’elle ne me consume pas de l’intérieur. Et en contrepartie, pour que l’espace vide qu’elle laissait en moi ne se remplisse pas de mauvaises choses capables de me ronger de l’intérieur, je comblais ce vide en le remplissant d’histoires douces, joyeuses et réconfortantes que j’écoutais sous forme de livre audio ou que je visionnais à la télévision.

Une fois ma peur exposée sur la papier, je pouvais enfin l’observer. C’est comme si lorsqu’elle était en moi, elle m’échappait, se rendant insaisissable et donc indisciplinable. Une fois sur le papier, je l’avais immobilisée. Elle devenait saisissable et disciplinable. J’ai donc commencer à l’observer, à l’étudier, à l’analyser, pour finir par la cerner et commencer à la domestiquer.

Ma peur, cet état de terreur dans lequel les violences subies en psychiatrie et la torture chimique infligée par les médicaments m’avaient plongée, petit à petit, au fil des pages et de mes écrits, ne devenait plus cet état sur lequel je n’avais aucune emprise et que je ne faisais que subir, comme le rat d’expérimentation qui reçoit des décharges électrique auxquelles il ne peut échapper, car enfermé dans sa cage. Non, je ne subissais plus ma peur comme le rat qui subit des décharges électriques de l’expérimentateur sans rien pouvoir faire. Non, je ne subissais plus ma peur, je pouvais après l’avoir mise sur le papier, l’observer et exercer une certaine influence sur elle.

Plus j’écrivais, plus je reprenais en main mes émotions, mon vécu et leurs conséquences. Extérioriser ce que je vivais en moi, me permettait de l’adoucir et d’y avoir accès.

J’ai lu le livre de Julia Cameron (Libérez votre créativité Osez dire oui à la vie !), il y a quelques mois, et je réalise que l’outil qu’elle propose – les 3 pages du matin – aux artistes pour libérez qui ils sont au fond, est un outil que j’ai utilisé spontanément au sortir du sevrage pour dissiper ma colère, ma haine, ma tristesse, mes angoisses et mes peurs, mais aussi pour expurger mon passé et la souffrance qu’il a occasionné.

En tant que maman, j’ai également lu le livre que Julia Cameron a écrit pour les parents qui souhaitent encourager la créativité chez leurs enfants (Libérez la créativité de vos enfants: éveiller le sens de l’émerveillement). Et c’est dans ce livre que j’ai découvert les 3 pages du matin. Voici comment Julia Cameron présente cette outil aux parents:

Les « pages du matin » – trois pages d’écriture par jour à effectuer à la main, uniquement par le parent.
J’appelle « pages du matin » l’outil de base de la (re)découverte créative. Pratiquées dès le réveil, elles permettent de détourner la négativité, car elles provoquent, clarifient, réconfortent, cajolent, donnent la priorité et synchronisent la journée qui s’annonce. […] Les pages du matin sont strictement privées. Elles représentent un lieu sûr où évacuer, méditer, élaborer des stratégies et rêver. Il n’y a pas de façon incorrecte de faire ses pages du matin. Il s’agit simplement d’écrire à la main – oui, à la main! – tout ce qui vous passe par la tête, et au bout de trois pages, vous vous arrêtez. Ne partagez ces textes avec personne. Certains de mes étudiants déchiquettent, brûlent, cachent ou mettent sous clé leurs pages du matin. […] Les pages du matin constituent pour le parent un kit de soutien portable et privé. L’éducation des enfants est une expérience émotionnelle, et vous avez le droit d’éprouver tous les sentiments qui se manifestent en vous. Les pages du matin constituent un lieu sûr où vous transformerez ces sentiments, ce qui vous permettra finalement d’être davantage présent dans votre journée.

Autant les 3 pages du matin constituent un kit de soutien pour le parent, autant les trois pages du matin constituent un kit de survie à celui qui se sèvre ou qui est en post-sevrage. Ecrire trois pages chaque matin permet, comme l’explique Julia Cameron de détourner la négativité et de transformer les sentiments et les émotions. Elles constituent un lieu sûr où s’épancher.

De plus, pour la personne en proie au bouleversement émotionnel et la totale remise en question générés par l’arrêt des médicaments, elles constituent un soutien, un kit de survie, à celui qui se retrouve souvent seul et isolé face à cette épreuve. Les fluctuations émotionnelles et les symptômes de sevrage peuvent être tels et survenir à des moments si inattendus, que disposer d’un « kit de survie portable et privé » pour faire face à ces sauts émotionnels, moraux et physiques peut littéralement nous sauver la vie.

Ecrire mon journal intime, en fin de sevrage et en post-sevrage, m’a, à n’en pas douter, grandement aidée à éviter le pire. Au lieu de mettre fin à mes souffrances en me supprimant, je les éloignais de moi en les mettant dans mon journal, atténuant ainsi leur intensité et leur portée, ce qui me permettait de ne pas passer à l’acte. Ecrire que je voulais mourir dans mon journal, me permettait de ne pas le faire. Ecrire comment je voulais mettre fin à mes souffrances suffisaient à les atténuer, à mettre fin à mon envie réelle de mourir. Car en fin de compte, ce n’est pas moi que j’avais envie de tuer, mais mes souffrances. Ce n’est pas à mon existence que je voulais mettre fin, mais à l’existence de mes souffrances. Je pense sincèrement que de ce côté-là, écrire m’a sauvé la vie.

L’écriture a constitué et constitue toujours pour moi un kit de survie!



© Carole Advices, le 10 juin 2019

Rebelle

 Un(e) rebelle qui est-ce?

Selon la définition du Larousse (2019), l’adjectif rebelle signifie:

Qui est fortement opposé, hostile à quelque chose, qui refuse de s’y soumettre : Un enfant rebelle à la discipline.

Qui se prête difficilement à l’action à laquelle on le soumet : Mèche rebelle.

Qui est difficile à guérir, qui ne cède pas aux remèdes.

Selon cette définition, être rebelle, c’est donc s’opposer, ne pas se soumettre, ne pas céder.

Pour CRNTL (2012), le (la) rebelle est aussi celui ou celle:

Qui se révolte contre l’autorité du gouvernement légitime, d’un pouvoir établi.

Qui ne reconnaît pas l’autorité de quelqu’un, qui n’est pas docile.

Et moi, tout comme la mèche rebelle, je ne me suis pas laissée manier: la psychiatrie n’a pas réussi « sa mise en pli ».

Je me suis révoltée contre ces psychiatres qui faisaient et qui font aujourd’hui encore autorité dans le domaine de la santé de notre mental. La société leur a donné ce pouvoir, celui de décider quel état mental est normal et quel état ne l’est pas.

Mon état mental, mon système de pensées, ma réflexion, mon imaginaire ne leur plaisaient pas. Selon leurs critères, ma façon de penser le monde et la société n’était pas dans la norme, dans ce qui est attendu.

Quand j’étais entre leurs mains, j’ai tout de suite montré que je ne reconnaissais pas leur autorité, que je ne les sentais pas capables de m’aider dans la situation difficile que je vivais et que je ne leur laisserai pas la moindre chance de m’imposer leur façon de concevoir la vie et leur façon de considérer mon état mental. Cette perte de pouvoir a certainement été difficile à gérer pour eux. Les gens pas dociles possédant des visions différentes, ils n’aiment pas. Alors, ils leur font baisser leur garde en appliquant les mesures de répression légitimes que l’Etat leur a autorisé à appliquer: ralentissement des fonctions mentales à l’aide de substances chimiques, contraintes physiques à l’aide d’éléments divers et variés qui limitent la liberté de mouvement (camisole de force, cellule d’isolement,…) et pressions psychologiques, émotionnelles et sociales par des menaces et des discours qui incitent à la peur.

Qui se prêterait docilement à cela? Qui mettrait sa vie, sa santé mentale ou son futur dans les mains de telles personnes?

La réponse à ces questions n’est pas simple. En effet, le choix d’accepter docilement de se soumettre à ces traitements ou pas va dépendre de l’envie de la personne de s’intégrer à la société dans laquelle elle vit et de répondre à ses attentes.

Dans notre société, les valeurs sont telles, qu’on attend des gens qu’ils soient performants, compétitifs et productifs. Qu’ils sachent gérer leur stress et leurs émotions et ce, surtout en public, et qu’ils se montrent sous leur meilleur jour au quotidien.

De plus, on attend d’eux qu’ils se soumettent au paradigme matérialiste sans restriction.

Les personnes qui ne partagent pas ces valeurs, mais qui essaient tant bien que mal de rentrer et de coller à ces normes, finissent par en souffrir.

Enfant, j’ai essayé de toutes mes forces d’être la petite fille qu’on voulait que je sois. Adolescente, j’ai essayé de toutes mes forces de coller au modèle de la jeune fille parfaite qui étudie et qui se projette dans un futur où elle exercerait une profession scientifique qui aiderait les gens à être heureux…. Mais déjà depuis l’enfance, qu’est-ce qu’il avait été difficile pour moi de me plier à toutes ces exigences qui m’obligeaient à cacher mes réactions naturelles pour qu’on m’accepte… pour qu’on m’aime.

Ne pas montrer mes peurs, ne pas crier mes colères face aux injustices, ne pas montrer ma tristesse,… Etre d’humeur toujours égale, ne pas faire de vague… suivre le troupeau… ne pas être ce mouton noir qu’on évince parce qu’il ne ressemble pas aux autres…

Des efforts et une énergie monstrueuse dépensés à être comme une petite fille doit être….pour être aimée.

Adolescente, ces efforts et cette énergie à être la personne qu’on attend qu’une jeune fille soit, j’ai continué à les déployer, mais ce n’était plus seulement pour qu’on m’aime, mais aussi et encore plus fortement pour ne pas être rejetée du système ou ne pas y avoir ma place.

A l’adolescence, je pense que la question que nombre de jeunes se posent est: y a-t-il un place pour moi dans cette vie? Et c’est là que la réponse que l’adolescent(e) va apporter, va être cruciale pour sa vie future.

En répondant à cette question, je pense que l’erreur que font beaucoup d’ados, mais d’adultes aussi, est de confondre:

Avoir une place dans la vie et Avoir une place dans la société

Lorsqu’on pense que pour avoir une place dans la vie, il faut avoir une place dans la société, nous allons tout faire pour répondre aux exigences de la société, de sorte à nous assurer une place en son sein et par là une place dans la vie.

Alors que lorsque l’on comprends que pour avoir une place dans la vie, il n’y a pas besoin d’occuper une « place standardisée et conforme aux normes de la société », alors on change complétement de perspective et au lieu de tout faire pour se conformer à ce qui est « bien vu » dans notre société, nous faisons ou plutôt nous devenons qui nous sommes: nous prenons cette place dans la vie qui nous permettra d’avoir notre place dans la société.

Adolescente, j’ai cru que pour avoir le droit de vivre, il fallait avoir une place dans la société et que pour avoir une place dans la société, il fallait faire comme on me disait: comme mes parents me disaient, comme les enseignements me disaient, comme les autorités me disaient….

J’avais tellement peur d’être rejetée et de ne pas avoir de place dans ce monde, que j’étais prête à tout pour qu’on m’accepte dans ce « cercle d’élus » qui vivent une vie heureuse dans le système social.

Mais le stress engendré par les années passées à réprimer ma vraie nature, à me conformer aux règles et à suivre le chemin sans joie que la société avait tracé pour les jeunes filles m’a rattrapé et épuisé.

Au gymnase (lycée), je n’arrivais plus à donner le change. Je n’arrivais plus à être celle qu’on attendait que je sois….

Pour réussir un parcours scolaire « sans faute » (la faute étant définie ici comme l’échec scolaire ou la non obtention du diplôme: chose qui est très très mal considéré dans la société), j’avais petit à petit mis de côté les derniers éléments de soupape qui me permettaient de gérer l’énorme stress engendré par la pression à la conformité. Enlever mes derniers moyens de m’évader et d’être moi-même, a été l’élément de conformisme de trop. Les vannes ont commencé à sauter! C’est comme si les coutures de l’habit de conformité que j’avais enfilé depuis mon enfance étaient en train de sauter!!!

Mon « habit de conformité » allait exploser et tout le monde allait voir que je n’étais pas comme eux, que j’étais un imposteur qui tentait tant bien que mal de cacher son anormalité et son incapacité à faire comme tout le monde sous un habit de normalité trafiqué de toutes pièces.

L’énergie et les efforts déployés pour cacher ma vraie nature et pour maintenir les apparences étaient tels que le soir, en rentrant chez moi, je m’effondrais littéralement….

Je commençais à fortement angoisser à l’idée que les gens réalisent que je n’étais qu’un imposteur incapable de faire comme tout le monde. Je déprimais à l’idée de ne pas savoir comment j’allais faire pour vivre toute ma vie avec cette pression trop forte: comment allais-je trouver, tous les jours, pendant encore au moins 60 ans, l’énergie pour donner le change et me conformer à ce que la société attend d’un individu qui aspire à vivre heureux en son sein?

A la fin de l’adolescence, j’étais épuisée par cette quête sans relâche de ma place dans la société. J’angoissais et je déprimais à l’idée de ne pas avoir ce que je considérais comme le précieux sésame pour mériter d’être en vie: pour moi si je n’arrivais pas à trouver et obtenir une place dans la société, je n’avais pas ma place dans cette vie, dans ce monde…

La pensée du suicide à l’adolescence…. je pense qu’elle vient souvent de là: de cette idée que si on n’arrive pas à se conformer ou à justifier notre utilité pour la société, alors on n’a pas sa place dans la vie.

Cette idée, je le sais maintenant, est complétement fausse: ce n’est pas parce qu’on n’est pas à la place à laquelle la société voudrait qu’on soit, qu’on n’a pas le droit de vivre. La société, c’est juste un ensemble de règles qui dictent comment un groupe d’humains a décidé de fonctionner ensemble. Si on a envie de fonctionner autrement, on a le « droit » et je dirais, on en a même le « devoir ».

Ce n’est pas parce qu’on ne souhaite pas fonctionner selon des règles et des valeurs qui ne nous correspondent pas qu’on n’a pas le droit de vivre!

Tout le monde a le droit de vivre sa vie comme il l’entend tant qu’il respect la vie de l’autre.

Bien évidemment, au moment où mon « habit de conformité » a commencé à craquer les coutures, mon entourage s’est inquiété. Mais la solution pour faire « rentrer les choses dans l’ordre » s’est rapidement manifestée: les redresseurs de non-conformité étaient là: les psychiatres se sont présentés à ma porte.

Tu n’arrives pas à faire comme tout le monde? Tu fais des vagues? On va t’aider à reprendre le droit chemin….ou on va te « planquer à la cave » avec les autres rebus de la sociétés, avec tous ceux, qui comme toi, n’arrivent pas à fonctionner comme on attend qu’ils le fassent.

Je conçois la psychiatrie comme « la section de la société » qui s’est donné et, au final, qui a légitimement reçu comme mission de faire rentrer dans le droit chemin, les individus qui ne se conforment pas aux codes sociaux.

Comme je n’arrivais vraiment plus à me conformer aux codes sans m’effondrer et faire craquer les coutures de mon habit de conformité, mon entourage a décidé qu’il fallait faire appel aux psychiatres pour qu’ils m’aident à comprendre comment être, penser et faire pour vivre une vie normale et heureuse.

Je ne voulais pas aller en psychiatrie, car je me suis dit qu’il allait me falloir fournir encore plus d’énergie et d’efforts pour « montrer ma normalité » pour qu’on « m’estampille: conforme pour vivre dans cette société: a sa place!« 

J’étais épuisée par les efforts que je fournissais pour suivre la voie scolaire qu’il convenait en vu d’obtenir le sésame qui estampille: « conforme aux exigences scolaires: a obtenu son diplôme!« . Je ne voulais pas devoir encore ajouter la contrainte de devoir prouver que j’avais un fonctionnement mental conforme.

J’ai donc tout fait pour ne pas aller en psychiatrie. Pendant plusieurs heures, je me suis opposée à leur décision de me faire suivre un traitement. Puis, à la fin, j’ai changé d’avis en me disant que si je ne me conformais pas à leur demande, ça allait mal finir, puisqu’ils faisaient autorité dans le domaine de ce qui est conforme ou ne l’est pas. Je me suis dit que si je voulais qu’on me considère comme quelqu’un qui fonctionne normalement, il fallait que je suive les règles de vie de la société et que j’aille faire un tour dans ce « service » pour que je prouve que j’avais les aptitudes pour me conformer à ce qui est attendu.

Mais comme les psychiatres m’avaient vue très réfractaire à leur proposition de traitement et que par ailleurs, ils s’étaient déjà fait une opinion sur mon état mental à la lecture des observations de psychologues qui m’avaient suivie pendant mon enfance, je pense que j’avais déjà sur le front, aveuglante comme la lumière d’un gyrophare, la très belle étiquette:

NON CONFORME! 

© Carole Advices 12 avril 2019

21. Comment réagir face aux symptômes de sevrage?

Comment réagir?

Face à l’insomnie

Le sommeil engendré par les benzodiazépines n’est pas un sommeil normal, mais celui-ci a tendance à se normaliser et à revenir au niveau précédent à cause de la tolérance.

Les rêves deviennent plus agités, les cauchemars apparaissent : c’est une réaction normale au manque de benzodiazépines et en même temps un signe précurseur du début de la guérison.

Le retour du sommeil profond semble être plus LONG après un sevrage, probablement dû au fait que les niveaux d’anxiété sont plus élevés, le cerveau est trop actif et donc il est difficile de s’endormir.

Cela peut durer parfois pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois.

Il est nécessaire d’avoir une hygiène de vie qui permet de rétablir la fonction du sommeil.

Face aux crises d’anxiété

Il est important d’apprendre à les gérer, de faire de la relaxation, des thérapies cognitives ou autres, de l’acupuncture, de l’aromathérapie, des massages, de la réflexologie, de l’homéopathie, du sport, du yoga, de la méditation…

Le fait de découvrir qu’une crise d’anxiété peut être contrôlée sans L’AIDE d’un comprimé accroît la confiance en soi…

La dépersonnalisation, la déréalisation

Apparaissent aussi pendant les crises d’ANXIETE et lors d’un sevrage rapide, mais aussi dans des cas d’extrêmes urgences et chez des personnes soumises à la torture.

Ces états protègeraient d’une souffrance intolérable.

Les hallucinations

Sevrage trop rapide

La dépression, l’agressivité et les obsessions

La dépression est courante durant l’usage à long terme d’une benzodiazépine et durant le sevrage et peut être le résultat de changements biochimiques au niveau du cerveau provoqués par les benzodiazépines.

On a vu que ceux-ci aidaient les GABA pour apaiser, MAIS en même temps ils RÉDUISENT l’activité de la sérotonine et de la norépinephrine, ces neurotransmetteurs que l’on sait impliqués dans la DÉPRESSION.

Celle-ci réagit aux antidépresseurs de la même façon que lors d’une dépression ordinaire.

Tous les autres symptômes disparaîtront eux aussi à la fin du sevrage.

Antidépresseurs et sevrage

La dépression peut parfois être sévère et exposer à un risque suicidaire, rare lors d’un sevrage lent et progressif.

L’anxiété peut s’aggraver temporairement au début du traitement, c’est pourquoi il faut démarrer doucement en augmentant la dose sur 2 ou 3 semaines.

Attention au Prozac en début de traitement: état agité, violent ou suicidaire.

La mise sous antidépresseur n’empêche pas la continuation du sevrage et il faut éviter d’augmenter la dose.

Les antidépresseurs calment la dépression, ont des effets anxiolytiques et aident activement le processus de sevrage d’une benzodiazépine 1.

NB: ce sujet est très controversé et les avis divergent fortement.

Le sevrage des antidépresseurs produit les mêmes effets que celui des benzodiazépines. Les antidépresseurs se sèvrent de la même façon, avec peut-être un allongement du palier pour plus d’efficacité.

Certains antidépresseurs ont un effet sédatif pour traiter l’insomnie.

Par ailleurs on peut comprendre pourquoi les benzodiazépines sont facteurs de dépression :

Cette augmentation de l’activité inhibitrice du GABA causée par les benzodiazépines réduit l’action des autres neurotransmetteurs prompts à l’excitation: la sérotonine, l’acétylcholine et la dopamine. Ces neurotransmetteurs sont nécessaires pour la mémoire, le tonus et la coordination musculaire, le fonctionnement hormonal, le rythme cardiaque, la tension artérielle et autres fonctions qui peuvent être altérées par les benzodiazépines.

Physiopathologie de la dépression :

La dépression est liée à une altération des systèmes de neurotransmission, notamment au niveau du cortex cérébral et du système limbique avec diminution des taux synaptiques de noradrénaline, de dopamine et de sérotonine ainsi que des perturbations dans l’homéostasie du glutamate.

 

22. Un sevrage est-il difficile et combien de temps dure–t-il?

 


1 La position personnelle de Carole est que l’ajout d’un médicament psychiatrique (antidépresseur, neuroleptique, benzodiazépine, stimulants, régulateurs de l’humeur…) ne constitue pas une aide au sevrage, bien au contraire ! En effet, à cause des graves effets secondaires que ces substances engendrent, elles constituent plutôt une entrave au processus de sevrage. Les graves effets secondaires qu’elles peuvent produire sont entre autres : la dépendance, un syndrome d’intoxication, une psychose toxique, la manie, une dyskinésie tardive, une akathisie, des comportements suicidaires, violents et même meurtriers.

Antidépresseurs: les symptômes de sevrage

Les symptômes de sevrage d’après Breggin (2013):

  • Des réactions émotionnelles allant de l’anxiété à la dépression et la manie
  • Des réactions physiques comme des acouphènes, des vertiges, un sentiment de perte d’équilibre et/ou diverses horribles sensations physiques souvent comparées à des chocs ou des décharges électriques dans la tête, le corps ou sur la peau.
  • Des changements d’humeurs :
  • Anxiété et attaque de panique
  • Dépression
  • Manie
  • Des envies suicidaires
  • Irritabilité et colère excessive
  • Insomnie
  • Rêves vifs et paraissant réels
  • Des sensations neurologiques anormales :
  • Vertiges, sensation de tourner ou sentiment d’instabilité
  • Sensations anormales sur la peau
  • Hypersensibilité au bruit et impression d’entendre des sons anormaux
  • Sensations comme des chocs électriques (particulièrement dans la tête)
  • Des mouvements anormaux :
  • Tremblements
  • Spasmes musculaires
  • Pertes d’équilibre et démarche similaire à celle d’une personne ivre
  • Des problèmes gastro-intestinaux :
  • Anorexie
  • Nausées
  • Vomissements
  • Diarrhée
  • Une faiblesse générale du corps
  • Fatigue et lassitude extrêmes
  • Douleurs musculaires
  • Frissons
  • Transpiration
  • Autres :
  • Problèmes visuels
  • Problèmes capillaires
  • Rougissement persistant

Comme le souligne Breggin (2013), ces symptômes ont une origine physique et non psychologique. Garder à l’esprit que si vous développez des sentiments dépressifs, anxieux, maniaque ou d’irritabilité dans les jours ou les semaines qui suivent le début du sevrage, il est nettement plus probable que ce soit une réaction de sevrage plutôt que le retour des problèmes émotionnels d’origine (Breggin, 2013).

 

L’état maniaque, la levée de l’inhibition et la perte du contrôle des impulsions sont les principaux dangers liés au sevrage des antidépresseurs

 

Série « Se reconstruire », 6 ème vidéo

Bonjour à tous,

La 6 ème vidéo de la série « Se reconstruire » après la médication psychiatrique est en ligne:

Reconstruction (vidéo 6): Sortir du vide et (re)trouver sa place dans le monde

Retrouvez les autres vidéos de la série ici: Playlist « Se reconstruire »

Bon week-end!!

Meilleures salutations,
Carole